Trois fois ma vie

Jean-François Sénéchal, éditions Leméac, collection jeunesse, 2024, 239 pages.

Mathilde a l’impression de ne pas en faire assez, de ne pas être assez, point, en plus d’être seule. Après avoir vu un reportage sur l’Ambassade à la télévision, elle s’y présente, espérant pouvoir s’impliquer. Rapidement, elle découvre les dessous de la vie de réfugié.es menacé.es d’expulsion, passant de l’activisme aux menaces verbales et physiques.

Dans ce tout nouveau roman de Jean-François Sénéchal (auteur de la trilogie Le boulevard), on retrouve l’empathie de l’auteur, son désir d’ouverture à l’Autre. Dans ce roman, Mathilde, qui est une jeune femme rien de plus ordinaire, permet au lectorat de voir ce que peut impliquer l’activisme dans ses plus beaux moments, mais aussi dans ses plus laids.

Rapidement, on s’attache à Mathilde dans son désir d’aider, d’en faire plus, mais surtout de comprendre les réfugié.es. Et Mathilde n’est pas le seul personnage attachant! Dans ses excès de colère, Marco cache un jeune homme furieux de voir ce qui se passe. Déjà, il n’a pas une vie facile. On dirait que s’impliquer pour aider les autres est un peu une façon de s’aider lui. Comme Mathilde, en fait!

J’ai particulièrement aimé, dans le roman, les chapitres où Mathilde partageait les histoires des réfugié.es qu’elle rencontrait. Je crois que c’est de découvrir ces personnages qui m’a le plus touchée. Certes, l’évolution de Mathilde est intéressante et il est d’autant plus percutant de voir combien l’activisme peut mettre en danger, mais rien n’égalera la parole laissée à celleux qui vivent le racisme et l’exclusion.

« Selon vos propres mots, vous êtes des « réfugiés de l’amour ». Difficile de comprendre comment l’amour peut attirer tant de haine. Même chose pour la couleur de la peau, la langue, le sexe, l’identité… D’un pays à l’autre, c’est peut-être seulement l’objet du mépris qui change. Toujours ce besoin du « nous », du « eux » pour mieux départager ce qui est bon, ce qui est mal. » (Trois fois ma vie, p.147)

Avec l’élection de Trump, le roman est totalement (trop) d’actualité.