Dis-moi qui doit mourir

Marc-André Chabot, éditions Libre Expression, 2019, 386 pages.
Alors qu’il prend un bière avec son meilleur ami, Antoine sauve le plus gros caïd de Montréal des balles. Pour se délester de sa dette d’honneur, le caïd demande à Antoine de lui donner le nom de cinq personnes qu’il se chargera de tuer. Découragé par le système judiciaire et ses injustices, Antoine laisse à la dette du caïd faire son petit bonhomme de chemin dans sa tête…

À la base, le roman me semblait franchement intéressant. L’idée de la dette d’honneur, d’allier un caïd à un homme tout ce qu’il y a de plus conventionnel et de profiter des pouvoirs d’un chevalier d’industrie pour réparer un système plein d’injustices… une recette gagnante pour un roman qui tient en haleine et qui nous fait sans cesse pencher d’un côté ou de l’autre.
Tout y était! Sauf que…
Le roman était, selon moi, trop dichotomique. Tout noir ou tout blanc. Les nuances étaient peu présentes, faisant en sorte que j’avais parfois l’impression de lire un règlement de comptes, une dénonciation. Certes, il y avait les discussions de chambre de hockey, qui venaient tempérer le personnage d’Antoine, mais celles-ci sont peu présentes. Les avocats de la défense sont peints comme des gens immondes, des complices de bandits. Oui, il y en a qui n’ont pas le sens de la justice collective, qui ont des motivations moins nobles, mais il ne s’agit pas d’une totalité.
« Après une quinzaine d’années à faire rager les procureurs de la Couronne, Liebstein n’est pas peu fier de son palmarès. Pour lui, c’est un jeu qui consiste à prouver aux gens ordinaires, si limités par leur perception primaire de la justice, que son talent et son esprit supérieur volent bien au-dessus de leur capacité à comprendre ce qu’est la loi et comment elle doit être appliquée. » (Dis-moi qui doit mourir, p.12)
Malgré cela, l’idée reste intéressante, elle nous permet de réfléchir à certains points, les arguments étant assez recherchés pour qu’on les considère véritablement. Des extraits intéressants pourraient être travaillés avec des élèves de 4e et de 5e secondaire. Le fil du récit parvient aussi à nous tenir en haleine, du début à la fin (qui m’a cependant semblée trop facile).
Dis-moi qui doit vivre

Il n’est, à mon avis, pas nécessaire de lire le premier tome pour comprendre celui-ci.
Délaissant un peu plus le personnage d’Antoine, on se lance ici dans une poursuite pour retrouver un tueur en série s’en prenant aux avocat‧e‧s de la défense.
« L’ennemi public, c’est lui. Pas la vieille peau qui paie ses honoraires. Cette épave ne représente plus un danger pour la société. Mais son avocat, lui, au nombre de fils de pute qu’il réussit à faire relâcher pour l’avancement de sa glorieuse carrière, est un pur fléau. Un fossoyeur d’espoir pour les victimes qui cherchent tristement à retrouver un sens acceptable à la mauvaise fortune qui leur est tombée dessus. » (Dis-moi qui doit vivre, p.45)
Bien que la vision soit encore une fois très dichotomique dans ce tome, je l’ai préféré au premier. Le parallèle des deux histoires, soit l’enquête pour découvrir le coupable des meurtres d’avocats et la réalisation des meurtres eux-mêmes vient en quelque sorte tempérer l’opinion très tranchée du tueur. On voit la justice des yeux de celleux qui doivent l’appliquer, ajoutant au débat d’autres réflexions.
L’histoire se déroule aussi plus rapidement que dans l’autre tome, particulièrement à la fin lorsque l’enquête s’approche de son dénouement. C’était parfois très tordu, mais brillant. Les indices dispersés çà et là sont réfléchis et sensés.