Novice

Stéphane Dompierre, éditions Québec Amérique, 2022, 288 pages.
Après la mort de leurs parents, Gabrielle et Mathieu se lancent dans l’organisation d’un camp de débranchement. 11 participant.e.s se retrouvent donc dans des petits chalets au fond des bois, n’ayant accès à aucune forme de divertissement électronique. Tout près des habitations est installée la Brute, qui travaille sur le meurtre de ces 11 personnages dépendants à la technologie.
Mon avis en deux mots? QUELLE LECTURE! Cynisme, critique sociale, humour noir, absurdité. Un cocktail audacieux et ô combien divertissant! Je ne m’attendais tellement pas à ces revirements, à ces inepties. La Brute nous surprend par ses gestes un peu maladroits, par son caractère tellement contraire à la mission qu’elle s’est donnée. Le destin des personnages, quant à lui, étonne chaque fois que l’un d’eux se met les pieds dans les plats.
Malgré ce côté humoristique et ces destins qu’on finit par deviner assez facilement, il reste un mystère entourant les personnages de Gabrielle, de Mathieu et de la Brute. On se questionne quant à leurs réelles motivations, à leur hypocrisie possible. Alors que nos personnages dépendant.e.s à la technologie, qu’on serait plus habitué de voir sous un jour filtré, nous semblent complètement authentiques, les organisateurs nous semblent, quant à eux, jouer un rôle. C’est un paradoxe intéressant qui s’ajoute au mystère de l’histoire.
L’autre élément que j’ai particulièrement apprécié dans cette lecture est le cynisme de l’auteur, sa critique sociale de notre dépendance à la technologie. Certes, les paroles de certains personnages (je pense ici principalement au voisin, cliché du mononcle qui pense en savoir plus que tout le monde sur Facebook) font grincer des dents pour leurs propos bourrés de stéréotypes, mais l’image nous devient assez claire de ces photos de profil cachées et de ces noms modifiés. Les personnages bourrés de clichés sont à prendre avec un grain de sel, avec une dose d’humour suffisante qui nous permet tout de même de réaliser que cette dépendance aux appareils électroniques n’est pas si loin pour bien des gens.
« Ils mettent la main à leur poche, par réflexe, alertés par un chant d’oiseau qui ressemble au son de leurs alertes, ou croyant avoir senti une vibration, encore surpris de ne pas y trouver le téléphone salvateur dans lequel ils pourraient se plonger, à la recherche de commentaires haineux à leur endroit sur leurs réseaux sociaux, plutôt que d’affronter les silences de malaise. »
Novice, p.51
Bref, cette lecture m’a franchement surprise. J’en garde un excellent souvenir et la suggère à toutes celles et tous ceux qui ont envie d’un cocktail un peu piquant.