Match.

Lili Boisvert, VLB éditeur, 2022, 186 pages.
Un peu tannée de la vie de célibataire qu’elle s’est imposée à cause de son émission féministe, Émilie retrouve les applis de rencontre et date quelques hommes. C’est là qu’elle rencontre Ludwig, un homme charmant qui pourtant lui posera comme première question si elle a déjà songé au suicide. S’ensuivent alors toutes sortes de drapeaux rouges qu’Émilie vient lever.
Ce roman, ç’a été une lecture commune entre ami.e.s. Et quand je dis lecture commune, c’est aussi qu’on a lu la première moitié les trois en même temps, nous arrêtant à la suite de chacun des chapitres pour discuter de nos impressions. Cet article sera donc un mélange entre mon avis et nos échanges personnels (j’en garderai quand même une partie secrète pour ne pas trop vous en dévoiler!).
Nous nous entendons sur une chose : nos attentes étaient clairement trop élevées! Vu tout le hype qui entoure ce roman, on s’attendait à peut-être plus. Si je regroupe nos trois notes, en moyenne, nous accorderions 3 étoiles à ce roman qui pourtant se mérite une moyenne d’un peu plus de 4,3 sur Goodreads.
Avons-nous ragé? Oui! Avons-nous sacré? Oui! Et quel plaisir ce fut de partager cette haine pour Ludwig ensemble! Cette relation toxique dans laquelle s’embarque Émilie est révoltante, c’est vrai. La violence psychologique que vit la jeune femme est très bien décrite. Cela dit, j’ai personnellement trouvé que sa façon de raconter cette relation était très externe, comme si cela ne la rejoignait plus. C’est une impression qui ne m’a pas quittée de la première moitié du roman. Peut-être cela m’a-t-il moi-même éloignée de ce roman, du bouleversement que je m’attendais à ressentir.
« ces témoignages, ces analyses, ces théories m’aidaient à intellectualiser ce qui s’était passé et, par là même, à m’en distancier. »
Match, p.183.
Rapidement, mon amie et moi avons fait un parallèle avec Le monstre d’Ingrid Falaise, qui nous a toutes les deux plus bouleversées.
Des extraits de nos discussions
Y a-t-il des passages qui vous ont marqués?
Quand il veut montrer aux autres qu’il est capable de la contrôler. J’étais bouche-bée.
Ça montre son emprise! Moi, ce n’est pas un passage, c’est plutôt la façon de montrer comment elle est déchirée à l’intérieur d’elle. La narratrice montre comment elle est complètement envahie par Ludwig et à la fois suffisamment lucide pour percevoir le stratagème.
« j’ai déambulé dans les corridors de l’hôtel sur mes talons, à la recherche de je ne sais quoi. De moi, peut-être. »
Match, p.148
C’est vrai hein! Ça vient aussi jouer avec son côté féministe je crois et j’ai trouvé ça super pertinent de voir que ce genre de relation peut arriver à tout le monde, même aux « femmes fortes ».
Tout le monde a un point faible, même ceux qui se disent forts. Sinon, le chapitre 5 est de loin, selon moi, le meilleur chapitre du livre. S’il y a 30 pages qui méritent d’être lues, ce sont elles : on voit clairement l’évolution de l’emprise de Ludwig sur Émilie. On voit très bien de l’extérieur et de l’intérieur par tous les processus à travers les deux personnages passent. Si j’avais à faire lire un bout de ce roman à quelqu’un qui vit ce genre de relation toxique, ces 30 pages sont parfaites.
Y a-t-il des éléments en particulier qui t’ont déçue?
Le manque de fluidité entre les différentes parties, comme si elles faisaient partie d’un casse-tête dont plusieurs morceaux sont perdus.
En effet, c’est l’impression que ça m’a donné aussi, mais j’ai aussi l’impression que c’est un point commun des récits d’autofiction. Je pense notamment à L’été au parc Belmont, Prague, Burgundy…
Bref, c’est une lecture de laquelle on attendait beaucoup et qui n’a finalement pas été à la hauteur de nos attentes. Cela dit, Match reste une lecture percutante qui permet encore d’aborder les relations toxiques et la violence psychologique.